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- Envolez-vous maintenant. Quittez la cave. Le balourd va revenir et sans doute qu’il ne sera pas seul !

- Flodoard, aide nous ! Existe-t-il un moyen de nous sortir d’ici, interrogea Jacquouilles d’une voix volontaire.

- Il faudrait qu’on puisse gagner la porte est du domaine, hoqueta le novice …

- La porte est ? s’enquit Leïf

-  Oui celle qui donne sur la forêt …

Tola qui ne perdait pas une miette de la conversation intervint depuis sa geôle.

- Jacquouilles ! attrape ce cor… Là, par le judas. Tu dois pouvoir l’ouvrir de l’extérieur …

- Après quelques efforts Jacquouilles parvint à débloquer le petit volet qui permettait d’espionner l’intérieur de la cellule. La corne passait tout juste.

- Dès que vous serez dans la forêt, sonnez du  cor. Puis, tout de suite,  déplacez-vous. Galfand saura vous trouver…

Le regard de Tola  et de Jacquouilles se croisèrent. Le berger comprit en un éclair toute la confiance dont on le gratifiait. Jacquouilles pensa un instant que c’était la dernière fois qu’ils se voyaient.

- Ne perdons pas de temps, partons ! Alrun les ramenait à la réalité.

Ils se dirent adieu avec ferveur puis Flodoard maintenant bien décidé dans son action prit la tête du groupe  en se glissant dans l’escalier.  

Ils entendirent le dernier conseil que Tola leur lançait des profondeurs :

- Prenez garde, la porte de la forêt est certainement bien gardée !

Quand ils sortirent à l’air libre, ils furent un moment tout éblouis par le soleil. Tout de suite à  leur gauche s’ouvrait  l’entrée est du cloître. Tous les moines étaient aux Vêpres et les galeries paraissaient désertes. Ils allaient se dissimuler derrière les colonnes pour contourner la salle du chapitre lorsque qu’ils aperçurent le frère pitancier en compagnie de deux frères lais qui s’en revenait vers eux. Flodoard les pressa: «  Pas par ici ! vite, prenez par le verger ! » Leîf poussa Peer en premier. Peer paraissait prendre un certain plaisir à cette partie de cache- cache, peu conscient des dangers qu’ils encouraient. Il paraissait tout heureux de se dégourdir un peu les jambes après cette longue période d’immobilisation forcée. Il semblait retrouver enfin le plaisir de l’action.  Leïf découvrait la vaste pommeraie qui  s’étendait derrière l’abbatiale et la salle du chapitre. Les frères lais avaient fauché tous les foins qui poussaient au pied des arbres. On n’allait pas tarder à cueillir les pommes pour la cidrerie du couvent. Nombre d’entre elles déjà jonchaient le sol et l’aîné de Scissy jaugea d’un coup d’œil qu’elles constitueraient d’excellentes munitions contre les sentinelles qui tenteraient de les intercepter.

Tout au fond du verger, on apercevait la haute muraille qui ceignait  le domaine monacal. En haut d’un escalier à double entrée, une épaisse porte étroite et fortement renforcée par une herse, était sous la surveillance de trois frères –lais qui s’activaient à préparer les paniers en osier destinés à la récolte des pommes.

C’est Jacquouilles, le berger de Karol qui leur dévoila la meilleure façon de procéder pour se rapprocher de la porte. Les frères lais chargés de surveiller l’entrée étaient éblouis par le soleil à l’ouest ; ils pouvaient de ce fait progresser par bonds, d’arbre en arbre, en alignant leurs silhouettes sur les troncs des pommiers qui les masqueraient à la vue des paysans.  Couchés dans l’herbe dans l’ombre de la salle du  chapitre, ils attendirent que le pitancier aidés de ses acolytes regagnent le cellier. Alors il fallut faire vite, car le gros moine n’allait pas tarder à s’alarmer de ne pas retrouver Flodoard attaché à son pilier. Un, deux, trois, soleil, ils commencèrent leur étrange ballet qui consistait essentiellement à ne pas se faire voir. Piqués au jeu, LeÏf et Peer étaient ravis du bon tour qu’ils jouaient à leurs ravisseurs. Plus inquiète mais non moins agile, Alrun admirait la dextérité avec laquelle Jacquouilles le berger se fondait dans le paysage, habitué à ce genre d’exercice utile  qu’il pratiquait sans doute depuis sa plus tendre enfance à approcher les bêtes pur s’en saisir.

 C’est à ce moment qu’ils entendirent le hurlement du pitancier qui venait de découvrir que Flodoard avait pris la fille de l’air. Ils étaient presque parvenus à la porte lorsqu’un d’autre serf qui ramassait des pommes les aperçurent.  Il voulut avertir deux autres cueilleurs de la présence d’intrus dans leur jardin. Il n’eut pas le temps de les héler  que déjà Leïf, vif comme l’éclair, ayant saisi une lourde de pomme, lui expédia son projectile en pleine poire.  L’homme poussa un cri en tombant par terre ce qui attira inévitablement l’attention des deux autres frères sur leur infortuné compagnon. Jacquouilles imitant LeÏf, avec la fougue de ses seize ans et l’adresse d’une longue pratique toucha le deuxième à la gorge, lui coupant le souffle.

Ayant vu cela, très étrangement, le troisième, alors que ses deux congénères se tordaient de douleur, leur fit des signes de d’apaisement leur indiquant de vite le rejoindre. Très vite ils l’entourèrent près à le lapider des pommes qu’ils avaient ramassées.

- La fontaine !

Il montrait une sorte d’abreuvoir ou aboutissait un large aqueduc qui descendait du mur par un aqueduc qui le franchissait. Cet aqueduc qui fournissait une bonne partie des réserves d’au de l’abbaye prenait sa source quelque part dans la grande forêt qui dominait le domaine.



Disparition des enfants